Département des Ardennes
Boult-aux-Bois (08)
Commanderie de Boult-aux-BoisDépartement: Ardennes, Arrondissement: Vouziers, Canton: Chesne — 08
Commanderie de Boult-aux-Bois
On remarquait dans la circonscription actuelle du département des Ardennes une belle Commanderie de Malte, celle de Boult-aux-Bois, canton de Chesne-le-Populeux. Elle était très-ancienne. On voit en effet quen 1282, le lundi avant la Nativité de Saint-Jean-Baptiste, Thibaut de Sauyeterre, vingt-sixième abbé de Mouzon, acquit pour son monastère, de Gérard, dit le bailli de Boult, une terre située au territoire de Harricourt, près de Buzancy, nommée "Malmaison", qui fut plus tard donnée à Robert de La Marck, seigneur de Sedan, en échange dun bien quil possédait à Brévilly (1).
Gallia Christiana, tome IX, col. 264, B. — Nicher. Histoire chronologique de Mouzon, Ms.
Par baux renouvelés en 1771, cette Commanderie jouissait de grands revenus, y compris une coupe annuelle de bois de 300 arpents.
Elle en possédait dailleurs 3000. Plusieurs fermes en dépendaient, entre autres celle de Boult-aux-Bois, celle de Merland, paroisse de La Neuville-en-Tourne-à-Fuy, et celle de la Chambre-au-Loup, paroisse de Vouziers.
La Commanderie de Boult-aux-Bois possédait encore dans la municipalité de :
Landres
Domus Hospitalis Landres
Domaine de lHôpital de Landres (Landres-et-Saint-Georges), un corps de ferme avec terres, prés et bois.
Rémonville
Domus Hospitalis Rémonville
Dans la municipalité de Rémonville, une pièce de terre.
Saint-Juvin
Domus Hospitalis Saint-Juvin
Dans la municipalité de Saint-Juvin, un petit corps de ferme.
Nouart
Domus Hospitalis Nouart
Dans la municipalité de Nouar quatre pièces de prés.
Au siége de la Commanderie, à Boult-aux-Bois, se trouvaient en 1789, le château, un corps de logis de deux travées à double étage dont lemplacement comprenait environ 60 verges de terre, et à lextrémité, une petite maison de trois travées, couverte en ardoises, un jardin entouré de doubles haies vives en épines et charmilles, de la contenance denviron un arpent de terre (2).
Archives des Ardennes, série Q, Domaines nationaux.
Voici les noms des derniers chefs de cet établissement:
Deschesnes, commandeur, mort octogénaire à Boult-aux-Bois, dans les premiers mois de lannée 1771;
Rogres De Lusigiun (Charles-Casimir), bailli de Champignelles, gouverneur de Rocroy en 1771, successeur du précédent. Il quitta la Commanderie de Boult-aux-Bois au mois de juin 1778 pour entrer en possession de celle de Sommereux, près Grandvillers-aux-Bois, diocèse de Beauvais, et mourut à Paris le 31 mars 1781;
Mascranny (Louis De), qui lui succéda, fut le dernier commandeur de Boult-aux-Bois.
La seigneurie de Seraincourt, canton de Château-Porcien, après avoir appartenu aux Templiers, fut dévolue aux chevaliers de Malte sous le titre de Commanderie.
Seraincourt était en réalité membre de la Commanderie de Boncourt dont le siège était à Boncourt (Aisne).
Il est question de la terre de Seraincourt dès lan 1179, dans une charte de Signy, à loccasion du traité qui intervint entre les religieux de labbaye dudit Signy et les Templiers, alors en différend au sujet de la contiguïté de leurs terres (3).
Notes et pièces justificatives, nº I.
La Commanderie de Boncourt possédait des biens dans la municipalité de Damouzy;
Elle possédait encore, au territoire de Launois, la ferme dAboncourt;
Dans la municipalité de Logny-lez-Chaumont, un petit corps de ferme;
Dans celle de Mesmont, une grange;
A Seraincourt, avec la seigneurie de ce nom;
Plusieurs corps de ferme et celle dite de Chaumontagne, un moulin à eau et plusieurs pièces de bois.
Lestimation faite de tous ces biens le 30 octobre 1790, fixait le revenu du domaine à 10 431 livres 15 sols.
Les charges locales et annuelles de Seraincourt sont ainsi établies dans la déclaration de biens faite en 1790:
— 1. Pour le curé de Seraincourt, pour sa portion congrue 550 livres.
— 2. Pour le pain bénit de Noël, douze livres 12.
— 3. Pour la cire de léglise, pain dautel, vin de messe et blanchissage, et entretien des linges et ornements de léglise, cent quarante livres 140.
— 4. Pour les dépenses de la réparation de léglise et presbytère dudit Seraincourt, année commune, la somme de quatre cents livres, y compris la fourniture des linges, ornements et autres objets pour le service divin 400.
— 5. Pour les gages de M. le lieutenant de la justice de Seraincourt, la somme de trente livres 30.
— 6. Pour les gages du garde-bois, cent cinquante livres 150.
— 7. Pour son logement, la somme de vingt-quatre livres 24.
— 8. Pour les frais annuels des officiers de la justice de Seraincourt pour les cueillerets desdits droits seigneuriaux, la somme de quarante livres 40.
— 9. Pour les frais annuels des mêmes officiers de la justice dudit lieu, pour les assiettes, délivrances et récolements des coupes ordinaires desdits bois taillis de Seraincourt, Forest et Chaumontagne, la somme de vingt livres 20.
10. Enfin, pour la dépense des réparations desdits château de Seraincourt, la grande ferme dudit lieu et le moulin à eau aussi dudit lieu, la somme de sept cents Livres 700.
— Le total desdites charges locales et annuelles sélevait à la somme de deux mille soixante-six livres 2 066.
Voici quels furent les deux derniers commandeurs:
En juin 1786, Hubert-Louis De Culant, bailli, grand-croix de lordre, de la vénérable langue de France, lieutenant du grand trésorier du même ordre, commandeur de Boncourt, Seraincourt et membres en dépendant, résidant à Malte.
En 1789, Nicolas-Pierre Desnos, chevalier profès, grand-croix de lordre, grand bailli de la Morée, commandeur des Commanderies de Saint-Jean-de-Latran, de Boncourt, lieutenant général des armées navales.
On prétend quil a existé sur le territoire de Villers-devant-le-Thour, canton dAsfeld, un couvent de Templiers, dont les biens auraient été donnés à labbaye de Saint-Martin de Laon, ordre de Prémontré.
Je terminerai cette courte notice par la nomenclature des Chevaliers de lOrdre depuis 1700 jusquen 1797, dont jai pu recueillir les noms, et qui appartiennent aux Ardennes ou qui sy rattachent par des liens de famille.
Grands Croix héréditaires:
Wignacourt (de), en raison des services rendus à lOrdre par cette illustre famille (4).
Notes et pièces justificatives, nº II.
Chevaliers honoraires:
Cossé De Brissac, duc de Cossé (Hyacinthe-Hugues-Timoléon), par grâce magistrale, 29 mars 1777, à cause de la dame de Wignacourt, son épouse (5).
Notes et pièces justificatives, nº III.
Lardenois (Jean-Baptiste De), comte de Ville, par décret du Sacré Conseil, 14 octobre 1747.
Wignacourt (Marie-Louise-Antoinette-Charlotte-Françoise-Constance De), épouse dHyacinthe-Hugues-Timoléon, comte de Cossé-Brissac, par grâce magistrale, 16 mars 1774.
Wignacourt (Balthazar-Philippe-Emmanuel-Charles, comte De) , par grâce magistrale, 11 juillet 1776.
Chevaliers reçus depuis 1700 jusquen 1797:
Aguisy (Antoine-Marie-Aimé D), 1er juillet 1786.
Dargent, à trois merlettes de sable, les deux du chef affrontées.
Artaize De Roquefeuil (Alexandre-Pierre-Charles-Suzanne D), 18 avril 1779.
De gueules, A trois fasces dor, accompagnées en chef dune molette déperon du même, au frane-canton de France mit ordonné.
Aubelin De Givry (Louis-Auguste), 18 mars 1780.
Dazur, au chevron dargent, accompagné en chef de deux étoiles dor et en pointe dune tête de cerf du même.
Ecuyer Dhagnicourt (Pierre-Marc L), 21 mai 1781.
Dargent, à trois merlettes de sable.
Failly (Alexandre-François-Guy-Abdon De), 30 mai 1768.
De gueules, à la fasce dargent, accompagnée de trais hachet darmes de même.
Failly (Pierre-Louis-Marie De), 30 mai 1768.
Mêmes armes.
Han De Martigny (Louis Du), 1725.
Tiercé en fasce, au 1 dor, à deux quinte feuilles de gueules, au 2 de gueules, à six losanges dargent rangées en fasce; au 3 dargent, à trois merlettes de sable.
Hennequin Decquevilly (Amable-Charles D), 13 août 1752.
Vairé dor et dazur, au chef de gueules, chargé dun lion léopardé dargent.
Hennequin Decquevilly (Armand-François D), 15 février 1795.
Mêmes armes.
Lardenois, comte de Ville (Jean-Baptiste De), 14 octobre 1747.
Dazur, à la fasce câblée dargent.
Maillart De Landre (Marie-Innocent De), 26 juillet 1756.
Dazur, à lécu dargent, au lion naissant de même.
Moreton De Chabrillan (Pierre-Charles-Fortuné De), 6 septembre 1771.
Dazur, à une tour crénelée de cinq pièces, sommée de trois donjons, chacun crénelé de trois pièces, le tout dargent, maçonné de sable; à la patte dours dor, mouvant du quartier senestre de la pointe, et touchant à la porte de la tour.
Moreton De Chabrillan (Louis-Armand-François-Casimir-Marie De), 24 février 1777 (6). Mêmes armes.
Notes et pièces justificatives, nº IV.
Pouilly (Louis De), 26 décembre 1785.
Dargent, au lion dazur, armé, lampassé et couronné de gueules.
Tour Dauvergne (Godefroy De La), 21 mai 1750.
Dazur, à la tour dargent, accompagnée de neuf fleurs de lys dor en pal, quatre de chaque côté, une en pointe; sur le tout une bande de gueules, chargée en chef dun écusson dargent.
Wignacourt (Jean-Baptiste Hermenigilde De), 10 juin 1711
Dargent, à trois fleurs de lys au pied nourri de gueules.
Wignacourt (François-Louis De), 13 juin 1756.
Wignacourt (Balthazar-Philippe-Emmanuel-Charles De), 11 juillet 1776.
Wignacourt (Antoine-Louis De), 11 octobre 1777.
Wignacourt (Albert-Emmanuel-Charles-Atoph De), 7 mars 1778.
Wignacourt (Adrien-Antoine-Marie De), 20 mai 1780.
Pour les pièces justificatives, vous pouvez les voir sur le site de Google page 65 et suivantes.
Sources: Revue Historique des Ardennes publiée par Ed. Sénemaud, archiviste du département — Tome 6, troisième année, deuxième semestre — 1867. Livres numériques Google
Commanderie de Boult-aux-Bois
Lordre des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, ensuite de Rhodes, plus tard de Malte, fut établi « pour combattre les infidèles. » Des trois « Langues » ou « Nations » qui composaient cet ordre religieux, les trois premières étaient françaises : la langue de Provence, la langue dAuvergne, la langue de France. Lordre était régi par un grand-maître qui avait sous sa direction, des grands prieurs, des baillis, des commandeurs, des chevaliers, des frères-servants darmes, des frères-servants de léglise, des frères dobédience.
Une des belles commanderies de Malte existait à Boult-aux-Bois. Elle était fort ancienne. Nous apprenons, en effet, que, vers 1282, Thibault de Sauveterre, vingt-sixième abbé de Mouzon, acquit pour son monastère, de Gérard, « bailli de Rouit », une terre dite la Malmaison, donnée plus tard à Robert de La Marck, en échange dun bien quil possédait dans la commune de Brévilly.
Par baux renouvelés en 1771, cette commanderie jouissait de grands revenus, y compris trois cents arpents de bois « pour coupes annuelles » ; en plus, de nombreuses fermes, entre autres celle de Boult-aux-Bois ; celle de Merland à La Neuville-en-Tourne-à-Fuy ; et à Vouziers, celle de la Chambre-aux-Loups où se trouvait une chapelle que labbaye de Saint-Hubert avait dédiée à son patron.
La commanderie de Boult-aux-Bois possédait encore, à Landres, un corps de ferme avec terres, prés et bois ; à Remoiville, une pièce de terre ; un « petit corps de ferme » à Saint-Juvin ; quatre « pièces de pré » à Nouart.
Au siège de la commanderie se trouvaient, en 1789 : le château, un corps-de-logis de deux travées à double étage, dont lemplacement sétendait sur soixante verges de terre ; et, à lextrémité, une petite maison de trois travées, couverte en ardoises, un jardin entouré de doubles haies vives en épines et en charmilles, de la contenance denviron un arpent.
La seigneurie de Seraincourt, canton de Château-Porcien, après avoir appartenu aux Templiers, fut dévolue aux chevaliers de Malte, sous le titre de commanderie. Seraincourt était, en réalité, membre de la commanderie de Boncourt, dont le siège était à Boncourt — Aisne. — Il est question de la terre de Seraincourt, dès lan 1179, dans une charte de Signy, à loccasion du traité qui intervint entre les religieux de labbaye dudit Signy et les Templiers, alors en différend au sujet de la contiguïté de leurs terres.
La commanderie de Boncourt possédait des biens dans la municipalité de Damouzy. Elle possédait encore, à Launois, la ferme dAbboncourt ; à Logny-lès-Chaumont, une petite-ferme ; à Mesmont, une grange ; à Seraincourt, avec la seigneurie de ce nom, plusieurs fermes, notamment celle de Chaumontagne, un moulin à eau et plusieurs pièces de bois.
Lestimation de tous ces biens, faite le 30 octobre 1790, fixent le revenu du domaine à 10,171 livres 15 sols.
— Voir Sénemaud : Revue des Ardennes.
Sources : Meyrac, Philippe Albert. Villes et villages des Ardennes, histoire, légende des lieux-dits et souvenirs de lannée terrible. Charleville 1898 BNF
Dhuy (La) (08)
Département: Ardennes, Arrondissement: Vouziers, Canton: Dun-sur-Meuse, Commune: Landres-et-Saint-Georges - 08
Domus Hospitalis Grange de La Dhuy
La Dhuy est aujourd'hui une ferme champêtre, située sur le territoire de Landres, canton de Buzancy, au département des Ardennes ; elle est en bordure du chemin qui conduit de Landres à Dun-sur-Meuse.
L'ensemble de ses bâtiments constitue un grand quadrilatère, entourant une cour, d'où monte, parmi les instruments aratoires, l'odeur des fumiers et où picorent de nombreux volatiles. Ces constructions n'ont pas d'architecture remarquable, et elles ne gardent aucune trace de la primitive chapelle.
Les propriétés qui l'encerclent forment un vaste hémicycle, dominé à l'est et au sud par le bois de la Ronlieule et le bois de Romagne.
Gouffre de La Dhuy
Domus Hospitalis La Dhuy, Gouffre
Près de la ferme existe une source profonde qu'on a décorée du nom de Gouffre de La Dhuy. Cette source a ses légendes. On raconte qu'il y a un siècle, un homme à cheval y disparaissait totalement ; on y vit même s'engloutir un chariot attelé de six chevaux, dont on ne put jamais rien retrouver, malgré de laborieux sondages.
Les anciens du pays disent encore qu'en 1792, les Prussiens de l'armée de Brunswick, campés à Landres, emportèrent les cloches de l'église, mais que, encombrés par leur fardeau, ils les jetèrent dans le Gouffre de La Dhuy, où elles sont peut-être encore.
Aujourd'hui, ce gouffre n'est plus qu'une mare aux canards.
Le ruisseau auquel il donne naissance mène ses eaux vers l'Aisne, après avoir arrosé Landres et alimenté plusieurs moulins.
Aux premiers siècles de notre histoire, des vignes florissantes drapaient les coteaux voisins ; et il y avait en aval un moulin et un vaste étang.
* * *
Le polyptyque de Saint-Remi cite, parmi les possessions de cette Abbaye, Adloisda, que tous les historiens traduisent par Adhuy Polyptychum Sancti Remigii. X. Decimæ de abbalia Sancti Thimothei ad hospitium Sancti Remigii.....
4. In pago porcensi... De Adloisda... de Baioni Villa (1).
Ce ne fut, dès les débuts, qu'une grangia ou grange dimeresse. Les locaux étaient établis pour recueillir les redevances en grains, les droits de terrage et autres, dûs aux seigneurs, aux abbés ou à leurs voués ; ils servaient aussi à l'exploitation de leurs domaines. C'est ainsi que les sires de Landreville avaient près de Cierges (Meuse), non loin de La Dhuy, la Grange-aux-bois, dont il est fait mention dans la charte de 1277 par Gobert de Dun.
Ces terres furent sans doute données à Saint-Rémi par Clovis, qui fit tant de libéralités à cet archevêque et à ses leudes. Et au douzième siècle, elles furent cédées aux Templiers, par donation, ou par achat aux abbés de Saint-Rémi (1).
1. Mannier, Ordre de Malte, les commanderies du grand prieuré de France, 1872, page 300.
— Dr 0. Guelliot, les commanderies de Boult et Merlan, in Revue de Champagne et de Brie, Tome II, 1877, pages 1-109-165.
— Dom A. Noël, l'ordre de Malte dans le diocèse de Reims, in Alm. Matot-Braine, 1895.
* * *
Depuis la chute du royaume de Jérusalem, les Templiers s'étaient répandus en Europe. Leur immense fortune leur avait permis d'acquérir de vastes propriétés. En Champagne, ils avaient une grande situation financière, de nombreux établissements agricoles, à ce point que leur puissance avait alarmé le comte de Champagne Thibaut IV, toujours besogneux : en 1228, il voulut même saisir leurs biens, et leur contesta le droit de faire des acquisitions dans sa province, sans son consentement.
Ils s'établirent à Belleville vers 1190 ; la terre de Boult-aux-bois, dépendance de Belleville, leur fut donnée par Richard de Liron, et cette donation fut continuée par le suzerain, Richard de la Haye. Déjà ils étaient à Merlan (1166), grâce aux libéralités de l'archevêque Henri de Reims. Ils élevèrent alors le temple de Bonlt — Bodillum in Bosco — qui fut le siège de la Commanderie de Boult et Merlan. Leur fortune s'accrut chaque jour de nouvelles acquisitions territoriales. Ils avaient des dîmes dans les villages voisins : Landres, Rémonville, Bayonville, Fossé, Nouart, Sivry-les-Buzancy, Thénorgues, Sommerance, Sain-Juvin, Cornay, Fléville (2).
2. Belleville et Boult, canton du Chesne.
— Landres, Remonville, Bayonville, Fossé, Nouart, Sivry, Thenorgues, Canton de Buzancy.
— Sommerance, Saint.Juvin, Cornay, Fléville, Canton de Grandpré.
— Merlan, écart d'Aussonce, Canton de Juniville.
La Dhuy était membre de la Commanderie de Boult et Merlan. Le commandeur en était seigneur. Il y avait haute, moyenne et basse justice ; et pour exercer cette juridiction, il avait le droit de commettre et d'instituer tous officiers, tels que bailli, lieutenant procureur, greffier et sergent.
Lorsqu'ils furent propriétaires de la Grangia de La Dhuy, les Templiers saisirent toutes les occasions d'agrandir leur domaine. La cense fit place à un manoir considérable. En général, ces centres agricoles étaient la résidence de quelques chevaliers, mais surtout de frères servants, qui s'adonnaient aux travaux des champs, et à l'extraction du minerai de fer. Ces frères avaient été créés lorsque les écuyers et les valets ne suffirent plus aux divers services des Templiers. Il y avait les servants d'armes, qui étaient les plus considérés, et les servants de métier, qui faisaient valoir leurs domaines.
Le treizième siècle vit encore s'accroître les revenus de La Dhuy.
Par une charte de juin 1209, Henri, seigneur de Landres, et Mathilde, sa femme, vendent aux chevaliers du Temple le quart du moulin et de l'étang de La Dhuy, dont les Templiers avaient déjà les trois quarts ; ils leur cèdent encore le cens du blé, qu'ils prenaient tous les ans sur la grange, et en outre tout ce qu'ils pouvaient avoir sur le Sart de la Cueulle (Chehueles). Milon de Germaine, comme seigneur dominant, approuve et confirme par ses lettres, cette vente, qui fut faite au prix de 20 livres, monnaie de Reims, et en plus une vache (1).
1. Pièces justificatives, I.
Cassini place le bois de la Cueulle à une lieue et demie à l'ouest de Landres, sur l'Agron. Ce fut ensuile le bois de Taille-gueule, territoires de Champigneule et de Grandpré.
Pourquoi cette suggestive appellation ? Souis Louis XIV vivait à Grandpré un soudard querelleur, du nom de Gauthier. Au régiment, il se battait chaque jour et aimait à faire des estafilades sur la face de ses adversaires, d'où lui vint le nom de Taille-gueules.
Rentré au pays, il devint garde-chasse du comte de Grandpré. Il eut un jour maille à partir avec des soldats de passage. On alla se mesurer dans le bois. Gauthier tua deux soldais et fut lui-même blessé mortellement. Au souvenir de ce drame, le bois fut appelé le bois de Taille-Gueules (2). C'est aujourd'hui le Bois des Loges.
2. Meyrac, traditions, coutumes, légendes et contes des Ardennes. Charleville 1890, page 324.
* * *
Nous arrivons au XIVe siècle. Alors règne en France Philippe le Bel (1285-1314), une des plus curieuses figures de l'histoire. Guillaume de Nogaret, qui fut le Cromwell de ce roi, fait de lui un portrait idyllique : il joignait, dit-il, à la beauté physique, la douceur et la piété. Flatterie d'historiographe. Car l'histoire impartiale dira que, sous ce vernis officiel, il cachait l'âme d'un tyran impitoyable. Déjà le Dante l'accablait sous ses strophes vengeresses. Il allait exercer sur les Templiers des cruautés de Pilate ; Guillaume de Nogaret fut son conseiller et l'exécuteur de ses vengeances. Ce sombre fanatique allait mettre au service du souverain son tempérament de sectaire, et épuiser sur les Templiers toutes les cruautés de la procédure inquisitoriale (Michelet).
La milice des Templiers avait été créée pour défendre le royaume de Jérusalem ; c'étaient les gendarmes de la Palestine (1118). Alors ils avaient une règle « brève et dure » : obéissance, pauvreté, chasteté.
Lorsque tomba Saint-Jean d'Acre (1291) le royaume de Jérusalem était perdu. L'ordre du Temple n'avait plus de raison d'être.
Cependant ils rentraient en France avec une fortune colossale, et, s'ils étaient inutiles, ils restaient fiers, insolents, formidables, mais odieux. Les grandes puissances financière ont toujours été impopulaires. Ils étaient détestés du peuple qui les enviait en bas, el des grands seigneurs qu'ils obligeaient en haut, Et on les disait avides, sans pitié, refusant le morceau de pain du mendiant.
On les accusa bientôt de vices infâmes, de pratiques scandaleuses contre la religion. Peut-être leurs mœurs, primitivement rigides, s'étaient-elles altérées au contact des Orientaux. Leur valetaille, disait-on, avait des vices inavouables. Puis ils enveloppaient leur existence de mystère : ils tenaient leurs réunions la nuit, comme les sociétés clandestines dangereuses. Alors le peuple de ce siècle, à l'imagination puérile, amplifia ces récits, et déversa sur eux le torrent des injures. On les traita d'hérétiques, la plus sanglante accusation qu'on pût alors porter contre un ordre religieux. Philippe le Bel et Nogaret vont spéculer sur ces superstitions. Mais il faut bien avouer que, devant ce roi sans scrupules, ils n'avaient commis qu'un crime, c'étaient d'être trop riches.
Le royaume était épuisé par la guerre flamande. Depuis la victoire de Mons-en-Puelle (1304), les coffres du roi étaient vides — et sous les yeux de Philippe besogneux, s'étalaient les trésors des Templiers ; il fallait les perdre, c'était le seul moyen de sortir d'une situation financière désespérée. Leur prétendue hérésie allait être le prétexte officiel.
Et le matin du 13 octobre 1307, à la même heure, par toute la France, les Templiers furent arrêtés, le grand maître Jacques de Molay le premier, tandis que les hérauts lisaient au peuple une proclamation emphatique, justifiant la conduite du roi, qui semblait prendre en main la défense de la religion, devant cette hérésie abominable. Nogaret avait silencieusement préparé ce coup de filet magistral, sans se soucier des droits de la Papauté, qui s'était réservé la juridiction des Templiers. Il fit instruire la cause par les inquisiteurs. Ce procès était jugé d'avance. Les tortures furent atroces : on leur broya les membres, on leur calcina les pieds. Il en mourut un grand nombre. Quelques-uns vaincus par la douleur, avouèrent tout ce que voulait le roi. En vain des protestations exaltées retentirent dans l'ombre des prisons (1).
1. Cf. Les classiques : histoire de France d'Anquetil, Henri Martin, Duruy, Michelcl, Lavisse et Ranibeau (Tome III, 23e fascicule page 37 et suivantes).
Parmi les détenus, nous trouvons Pierre de Landres, incarcéré dans la maison de l'abbé de Lagny, près de la porte du Temple de Paris. Avec lui étaient d'autres frères ardennais : P. de Membressis, P. de Verrières, Decanus de Cholilly, J. de Poilcourt, Nicolaus de Manre, Fulco de Duno...
Tous les Templiers étaient de noble extraction, beaucoup de servants même étaient chevaliers. J'ignore si Pierre de Landres avait un blason. Il était serviens c'est-à-dire frère servant. Il fut amené devant les commissaires de Philippe le Bel le samedi 14 février 1310, dans la chambre de la cour épiscopale. On lui demanda s'il voulait défendre l'Ordre des Templiers contre les attaques dont il était l'objet. Il répondit affirmativement, et supplia instamment qu'on lui administrât les sacrements, puis qu'on lui rendît la liberté.
Nouvel interrogatoire le mercredi 18. Il voulait s'incliner devant ses supérieurs, devant la règle du Temple. Il était prêt à élire des procureurs, pris parmi les Templiers, pour défendre la milice. Parmi ces accusés, aucun n'avoua, même sous la question, les erreurs reprochées aux chevaliers.
Ils choisirent des procureurs qui rédigèrent leur défense. Le 7 avril, ils présentèrent aux seigneurs commissaires une adresse, qui est un beau morceau d'éloquence.
Leur voix fut étouffée. Le roi les fit condamner par l'archevêque de Sens, et par son ministre Enguerrand de Marigny. Le 12 mai, cinquante-quatre chevaliers montèrent sur le bûcher. Sans doute Pierre de Landres fut parmi les victimes : on n'entendit plus parler de lui.
Sans se soucier des plus véhémentes protestations, Philippe le Bel supprima l'Ordre des Templiers le 3 avril 1312. Le pape, le concile de Vienne (1311), où siégeait l'archevêque de Reims, s'associèrent à cette sanglante destruction. Le roi s'empara des biens de l'Ordre et garda les domaines jusqu'à sa mort. Alors seulement les propriétés furent transmises aux hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, plus tard Ordre de Malte, qui déjà possédait Saint Jean de Rametz (Villers-devant-Dun, Meuse).
Parmi ceux qui s'humilièrent, les uns se marièrent, d'autres entrèrent dans les ordres monastiques, d'autres enfin s'adonnèrent aux travaux des champs.
* * *
On ignore comment finirent les Templiers de l'Argonne. Ils n'ont laissé aucun mémoire. Ils durent s'enfuir vers la frontière. La tradition veut que quelques-uns aient cherché à demeurer dans la contrée et à se retirer au fond de la grande forêt.
Il existait, tout près de Landres et de La Dhuy, dans le bois de Romagne, en une gorge étroite appelée le Cercueil, le Cirqueu ou le Circuit, une maison perdue dans la profondeur des bois qui, au XIVe siècle, étaient des futaies impénétrables. Il en existe encore quelques vestiges. C'était un vaste bâtiment, formant un carré régulier de quatre-vingt-dix mètres de côté. Il était entouré d'un fossé de cinquante pieds de large. Dans ces fossés jaillissait une source, dite Fontaine des Capucins, et, plus bas, il y avait un étang qui portail le même nom. Aujourd'hui le sol est encore semé de tuiles courbes, d'ardoises épaisses, et de poteries diverses. On y a découvert 12 pièces de monnaie de forme quadrangulaire, de 6 lignes de largeur, où était figurées, sur l'avers une tête d'homme, sur le revers une vache. On y aurait aussi trouvé des couverts d'argent, des ustensiles de ménage et d'autres pièces de monnaie frustes.
La tradition rapporte que c'était un couvent de Templiers ; ils s'y étaient réfugiés pour fuir la persécution. Elle ajoute même que, sur l'ordre de Philippe le Bel, ils y ont été égorgés et brûlés, sous prétexte de sortilège, et que parfois encore, au souvenir de ces supplices monstrueux, les revenants viennent errer parmi ces ruines. Mais on cherche en vain, dans les mémoires du temps, la confirmation de ces faits (1).
1. Clouet, histoire de Verdun et du pays verdunois, Verdun, 1867. Tome III, page 86
— Henriquet et Renaudin, géographie du département de la Meuse, 1858.
— Biguet, monographie de Gesnes, in Journal de Montmédy du 7 avril 1896.
— Narrateur de la Meuse, 1820, Tome XXXII, page 64.
L'Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, plus tard de Rhodes ou de Malte, était plus ancien que celui des Templiers. Ils prirent, simplement, aux yeux du peuple, la place des Templiers, dans tous leurs biens et droits seigneuriaux. Rien n'était changé à La Dhuy que l'étiquette. Et le domaine reprit sa vie agricole régulière.
* * *
Les Templiers construisirent de bonne heure une chapelle dans leur manoir de La Dhuy. Nous ignorons la date exacte de son érection ; mais nous avons des détails sur elle dans les dernières visites faites par les Commandeurs, particulièrement eu 1773 et 1779 (2).
2. Archives nationales, S. 5032 et S. 5470.
Elle subit les mêmes vicissitudes que la cense, et, comme elle, fut détruite dans les guerres du XVIIe siècle. Elle fut remise à neuf eu 1693 par le grand maître Adrien de Vignacourt.
Elle était construite en pierres et avait environ 22 pieds de long sur 16 de large et 18 de haut, couverte primitivement en tuiles plates, plus tard en ardoises. Elle était adossée au mur de clôture à l'aspect du levant. Elle était planchette et plafonnée. L'autel était en bois ; sur cet autel étaient un crucifix de bois, dont le Christ était d'ébène, et deux chandeliers de bois. Le clocher n'avait plus de cloché au XVIIe siècle.
Elle était dédiée « à l'honneur de Dieu et de Saint-Jean-Baptiste » dont le tableau était dans le contre-retable.
En 1773, on y voyait, dans une armoire à ce destinée : un calice avec sa patène d'argent, doré en dedans ; deux burettes d'étain, une cuvette de faïence ; une aube avec sa ceinture ; trois amiets, deux corporaux, deux purificatoires, trois lavabos, un ornement rouge et un vert complets, deux nappes d'autel, un tapis de brocalelle rouge, blanc et vert, un missel romain, un « pipitre » de bois et un marchepied.
Les ornements étaient donnés par le commandeur. Ils étaient estimés 64 livres en 1666.
Cette chapelle était indépendante du domaine et desservie par un aumônier de l'Ordre.
En 1773, le curé de Chennery y disait une messe tous les mardis ; il recevait pour cela 47 livres 10 sols par an (1). Plus tard le curé de Landres, qui lui succéda, ne venait officier que le premier jeudi du mois, moyennant uue rétribution de 47 livres ; les autres jeudis il célébrait une messe dans son église, pour l'acquit des fondations. En 1791, il recevait 48 livres et 6 livres pour l'entretien des cierges et des linges.
Le commandeur de Boult était collateur à la Cure.
1. Chennery, écart de Bayonville, commune de Buzancy.
Cette chapelle fut détruite à la Révolution et il n'en reste plus aucun vestige. A côté de la grange dîmeresse existaient généralement un réfectoire, un dortoir et une salle capitulaire, où on observait la même discipline qu'au Temple. Nous ignorons si ces dépendances ont existé à La Dhuy.
* * *
Les Terriers des Templiers, ou plutôt des Hospitaliers de l'Ordre de Malte, déposés aux Archives nationales, donnent diverses descriptions de La Dhuy.
A côté de ce domaine, entre le chemin qui va de Landres à La Dhuy et le chemin de Landres à Remonville, au sud de la ferme de la Bergerie, ces seigneurs possédaient encore deux fermes considérables, les Hauts Hazoirs et les Bas Hazoirs, qui furent détruites pendant les luttes de la Fronde, et qu'il faut aujourd'hui classer parmi les localités disparues.
La carte de l'état-major indique toujours les Bruyères des Hazois ; Vendol écrit plus correctement Bruyères des Hazoirs. Ce bois existe encore. On aperçoit, près de lui, une cavée boisée et les restes d'une citerne : c'est certainement l'emplacement des Hazoirs.
Dès l'année 1544, les Hazoirs avaient été donnés, par bail emphytéotique, à M. de Chamisso, seigneur d'Andevanne, et à M. de Maillart, seigneur de Landres, moyennant une redevance de 50 livres (1).
1. Claude de Chamisse, seigneur d'Audevanne, capitaine de cinquante arquebusiers à cheval.
— Ecu : d'argent à cinq trèfles de sable, 2, 1, 2, à deux mains dextre et sénestre de même en pointe renversées en pal.
— Pierre de Maillart, baron de Landres, seigneur de Fléville, Curnay, Sommerance, Sivry, Sain-Marce), Gruyères, Mézicrcs en p....
— Ecu : d'azur à l'écusson, en abysme d'argent au lion naissant de même, lampassé de gueules.
Le terrier de 1608 constate que le hameau de La Dhuy, possède 259 arpents 89 verges, plus 8 fauchées de prés 19 verges, et est loué 270 livres tournois. A cette époque la ferme des Hauts Hazoirs contenait 332 arpents et deux petites garennes, avec 14 espaces de bâtiments ; et les Bas Hazoirs, 165 arpents, outre un manoir et des bâtiments. Les fermiers des Hauts Hazoirs étaient Claude de Chamisso, seigneur d'Andevanne el Bernardine de Brun, veuve de Prudent de Chamisso (1e février 1608) ; la deuxième ferme était louée à Charles de Maillart, seigneur de Landres, qui acheta, le 20 septembre 1602, une partie des Bas Hazoirs, venant de Henri le Fauconnier (2).
2. Archives Nationales S. 5168.
— Terrier du chevalier Ogier d'Amour.
— Ecu : d'argent à trois clous de sable posés deux et un, surmontés d'un porc épic passant de même.
En 1663, les Hauts Hazoirs constituent une seigneurie où les Commandeurs de Boult ont haute, moyenne et basse justice. La ferme possède 300 arpents, dont la plupart sont en friches. Les bâtiments ont été totalement détruits. Il y a cependant encore trois censiers qui paient à Noël 100 livres tournois. A la même époque, les chevaliers de Malte possèdent le tiers des dîmes, tant grosses que menues, de Remonville, à l'exception que l'abbé de Belval en prend le tiers dans la totalité (3).
3. Archives Nationales S. 5469, page 214.
Le procès-verbal des visites de 1665, sous le commandeur Adrien de Vignacourt, donne aux domaines de La Dhuy une contenance de 225 arpents et demi de terres et 8 arpents 60 verges de prés ; il accuse en outre la propriété du 1/8 des dîmes de Landres, et le 1/3 des dîmes de Sommerance.
La Dhuy est louée 600 livres en 1666 ; les Hauts Hazoirs contiennent 300 arpents, les Bas Hazoirs 130 arpents, ce qui donne avec La Dhuy un total de 700 arpents. Tous les bâtiments de La Dhuy sont remis à neuf.
Le chevalier Louis de Blécourt de Tincourt fait rédiger un nouveau terrier en 1696 ; c'est un volume in-folio relié à ses armes : un lion d'argent sur champ de gueules (4).
4. Archives Nationales S. 5470, page 222, V°
Il est procédé en même temps à un arpentage des terres. Le premier et le deux mai, cette opération est faite aux Hazoirs, en présence de Nicolas Dardart, laboureur à Remonville, fermier du commandeur, et Guyon Ponsigilon de La Dhuy ; elle constate aux Hazoirs :
1° pièce de terre, lieudit la Rouchierce, contenant 75 arpents 40 verges 1/4.
2° pièce de terre de la Haute Hazoy, 196 arpents 89 verges.
3° garenne de la Haut Hazoy, 13 arpents 30 verges y compris le paquit de la Haut Hazoy.
4° petite garenne au même lieu, 2 arpents 37 verges.
Il y avait autrefois trois censiers et 14 espaces de bâtiments, incendiés pendant les guerres.
Basse Hazoy : 1° 263 arpents 91 verges.
Il y avait sept espaces de bâtiments également brûlés.
Le 3 et le 4 mai eut lieu l'arpentage de La Dhuy.
Description des bâtiments, granges, chapelles....
Terre du Bochel, près du bois, de Bantheville, 23 arpents 33 verges.
Terre des longues royes, près du ban de Landres, 82 arpents 75 verges.
Terre: Gozart et le Chenois, près de la Haute Hazoy, 153 arpents 23 verges 1/3.
Près de La Dhuy royé le chemin de Landres, 5 arpents 26 verges 3/4.
Le Plessis : 3 arpents 84 verges 1/2.
Pré du bourd royé Madame de Landres 130 verges.
Il y avait autrefois un moulin à eau y attenant, et qui est en ruines.
Le 15 juillet 1773, le commissaire des Hospitaliers de Boult dresse un nouvel état de ces propriétés, accompagné du vénérable Charles-Casimir de Rogres de Champignelles, plus connu sous le nom de Bailli de Champignelles, dont les armes étaient : Gironné d'argent et de gueules de 12 pièces (1).
1. Archives Nationales S. 5032. Terrier très détaillé. On y trouve encore une visite du 29 juillet 1788.
Il décrit avec détail la chapelle et les logements des deux censiers de La Dhuy, guidé par l'un d'eux, Charles Rochon. Il donne la mesure des granges, écuries, poulailler, four, baraques à porcs ; il parle des jardins et des arbres fruitiers. Il rappelle l'existence de deux garennes de 15 arpents.
Alors les fermiers avaient un bail de neuf ans, passé par les sieurs Doré et Guèrin, par devant maître Boizet, notaire, le 22 novembre 1767, moyennant 800 livres, soit 400 pour chaque censier. La Dhuy avait alors 365 arpents 25 verges, autant terres, que de prés, bois et broussailles. Les Hazoirs n'étaient pas compris dans ce bail ; ils contenaient 424 arpents 73 verges, et étaient loués à M. de Landreville pour 270 livres ; celui-ci avait demandé au commandeur de Boult à en devenir acquéreur (1773) ; il devait céder, en compensation, une partie de la Seigneurie de Chatillon.
Cet échange n'eut pas lieu, car les Hospitaliers possédaient encore les fermes en 1779.
Le Bailli de Champignelles fit d'importantes réparations à La Dhuy vers 1773.
Nouvelle visite en 1779, donnant des détails sur le mobilier de la chapelle, sur les logements des fermiers et les bâtiments de la ferme. Alors La Dhuy contenait 365 arpents de terre, 5 arpents 68 verges de prés ; les Hauts et Bas Hazoirs contenaient 424 arpents 71 verges de bois et pâturages. Le tout était affermé à Renesson pour 1.600 livres. Au moment de la Révolution, les fermes avec les dîmes de Landres rapportaient aux Hospitaliers 2.017 livres.
J'ai dit que les Hospitaliers possédaient le huitième des dîmes de Landres. On en trouve la déclaration au terrier de 1696, visite du 27 juillet. Devant les commissaires comparaît le S. Gouverneur, qui déclare qu'audit seigneur Commandeur appartient un huitième de toutes les dîmes, tant grosses que menues de tout le ban et finage de Landres ; ces dîmes se perçoivent aux champs à « raison de 13 gerbes une, et les menues dîmes à la même raison, de quoi ledit seigneur est en bonne et paisible possession sans trouble... (1) » En 1779, cette portion des dîmes valait 200 livres.
1. Archives Nationales S. 5470, page 218, V° Landres.
* * *
Il est intéressant de suivre la progression des revenus des nombreuses fermes et dîmes que possédait la commanderie de Boult.
En 1495, elles rapportaient 351 livres
En 1583, 4.800 livres
En 1757, 15.200 livres
En 1768, 19.700 livres
Et en 1788, 24.952 livres.
A la Révolution, les fermes de La Dhuy devinrent biens nationaux, comme toutes les propriétés des émigrés.
Les archives communales de Landres possèdent la déclaration de Duval, régisseur et fondé de pouvoir du Commandeur de Boult, du 27 mai 1791. Il attribue à La Dhuy une contenance de 338 arpents, 54 verges 1/2 de terres, prés et broussailles ; 26 arpents 70 verges 1/2 de terres et bois, à la Roncheule, 5 arpents 68 verges de terres et prés au pré de Landres. En outre il accuse 424 arpents 72 perches pour les Hazoirs. Le tout affermé à Charles Rennesson de La Dhuy pour 1850 livres. Le huitième des dîmes de Landres, appartenant aux hospitaliers de Boult est affermé par bail du 30 juin 1786 au curé de Landres Nicolas Poulain pour 200 livres (3).
3. Voir les détails, pièce justificative pour les dépenses (chapelle, bâtiments, garde).
Le 27 avril 1793, La Dhuy a été mise à prix et adjugée provisoirement au citoyen Nicolas Collin de Chevières pour 50.000 livres ; après de nouvelles enchères, à Louis-Joseph de Raux de Mont-Blainville moyennant la somme de 60.300 livres ; il devait payer comptant le douzième dans la quinzaine, à la caisse du district, et, après ce versement, il entrait en possession réelle desdits biens « comme propriétaire incommutable sous les charges de la cédule » Quant au surplus, il s'engageait à le payer en 12 versements, avec intérêt à 5 pour 100 (1).
1. Archives départementales des Ardennes a. 249.
Dans la suite, La Dhuy devint la propriété du citoyen Lombard, qui déjà possédait le château de Landreville et ses dépendances.
Plus tard, il revendit le tout au baron de Landres. L'acte qui confirme cette cession est au chartrier des Maillard de Landres, chez M. de Meixmoron de Dombasle, au château de Landreville, puis elle passa aux mains de divers acquéreurs.
Pièces justificatives : BNF
D. A. Lapierre. Revue d'Ardenne et d'Argonne : scientifique, historique, littéraire et artistique, pages 237 à 253. Sedan 1915 - BNF
Grand-Champ (08)
Domus Hospitalis Grand-ChampDépartement: Ardennes, Arrondissement: Rethel, Canton: Novion-Porcien, Commune: Wasigny — 08
Domus Hospitalis Grand-Champ
Cette maison est une fondation de l'Hôpital, qui remonte aux premières années du XIIIe siècle. Nous avons trouvé une charte de Roger, seigneur de Rosoy, « de Roseto », du mois de décembre 1206, approuvant et confirmait la donation que sa soeur Elisabethe de Grand-Champ avait faite aux frères de l'Hôpital de Jérusalem, de sa maison de Grand-Champ, « domum suam de Magno Campo », qu'elle tenait de ses parents, avec tout le mobilier qui s'y trouvait, et une charrue de terre. Cette donation comprenait, en outre, la moitié de deux moulins à Grand-Champ, dont le revenu devait être consacré à l'entretien de deux religieux qui desserviraient la chapelle qu'on allait construire.
Geoffroy, fils d'Elisabethe de Grand-Champ, voulut mettre obstacle à l'exécution de cette donation. Mais bientôt, mieux avisé, il y donna son assentiment, toutefois sous certaines réserves, ainsi qu'il résulte des lettres de Raoul, seigneur de Château-Porcien, du mois d'avril 1208. Par ces lettres, Geoffroy consentit, en outre, que les Hospitaliers auraient le droit d'usage dans ses bois et pâturages, à la condition qu'ils ne pourraient faire à Grand-Champ aucune acquisition sans sa permission.
En 1224, Elisabethe, dame de Château-Porcien, « Castri Porciensis », et soeur de Roger, prit à sa charge la maison de l'Hôpital de Grand-Champ, en y installant à ses frais un chapelain et un clerc pour desservir la chapelle, et après s'être engagée à laisser à sa mort la maison aux Hospitaliers, avec toutes les améliorations et les agrandissements qu'elle aurait pu y faire.
On trouve plusieurs lettres d'amortissement des années 1270 et 1292, en faveur des frères de l'Hôpital, pour un assez grand nombre d'acquisitions de terre faites par eux à Grand-Champ et sur les territoires environnants.
La maison de l'Hôpital se trouvait sur le chemin de Grand-Champ conduisant à Wagnon. Les terres, au nombre de 90 journaux, étaient situées en plusieurs pièces au Ruissel-Trognon, au Champ-Charbonnier, au Pré-Watier-le-Roux, au Mont-Riant, au Trou-le-Chevelou, et au dessus de La Fontaine (censier de 1497).
Près de la maison, on voyait un vivier et un moulin à moudre blé.
Le Commandeur avait dans son domaine de Grand-Champ, toute justice et seigneurie. Le revenu, qui était en 1497 de 7 livres tournois, s'élevait en 1757, à 389 livres; et en 1783, à 540 livres.
Sources: les commanderies du Grand-Prieuré de France — Eugène Mannier — Paris, Aubry et Dumoulin, 1872 (Paris)
Sainte-Croix (Ardennes) (08)
Domus Hospitalis Sainte-CroixDépartement: Ardennes, Arrondissement: Charleville-Mézières, Canton: Omont, commune: Baâlons — 08
Domus Hospitalis Sainte-Croix
Cet ancien établissement de l'Hôpital Sainte-Croix existait, au commencement du XIIIe siècle. Il se composait d'une maison avec plus de 100 arpents de terre. C'était un ancien fief amorti, où la commanderie avait la haute, moyenne et basse justice.
Un désaccord régna assez longtemps entre les frères de l'Hôpital de Sainte-Croix et Simon, seigneur de Baâlons, au sujet d'un bois et du droit d'usage que l'Hôpital prétendait y avoir. Des lettres de Aubry, archevêque de Reims, du mois d'avril 1213, mirent fin à ce débat par une transaction. Il fut convenu entre les parties, que les Hospitaliers qui demeureraient dans la maison de Sainte-Croix, auraient le droit d'usage dans le bois, pour y prendre de quoi se chauffer et faire leurs constructions;
Que les hommes de Sainte-Croix, « de Villa Sancte Crucis », jouiraient du même droit pour leur chauffage et pour faire leurs clôtures;
Que les essences de hêtre et de chêne seraient les seuls bois dont ils ne pourraient disposer;
Qu'il leur serait facultatif de faire leurs chariots, soit à Sainte-Croix, soit à Baâlons ou ailleurs.
Mais s'il était prouvé qu'un homme de Sainte-Croix ait pris plus de bois qu'il n'en fallait, pour faire un chariot par an, il paierait dans ce cas, deux sols d'amende au seigneur de Baâlons.
Tout homme de Sainte-Croix possédant un animal de trait, « trahens animal », devait payer chaque année au seigneur de Baâlons, deux setiers d'avoine et deux poules. Celui qui n'avait pas d'animal de trait, ne devait payer que la moitié de la redevance.
Chaque homme devait une corvée par an au seigneur, pour conduire son bois à Baâlons.
Enfin les frères de l'Hôpital et leurs hommes pouvaient faire paître leurs bestiaux dans toute l'étendue du territoire de Sainte-Croix, moyennant deux setiers d'avoine à donner chaque année au seigneur.
La maison de Sainte-Croix était située sur le chemin de Mezières à Attigny, et comprenait 112 arpents de terre avec l'enclos de la maison.
La commanderie avait toute justice et seigneurie à Sainte-Croix.
Le revenu de cette terre qui était affermée, en 1497, 4 livres tournois, montait en 1757, à 236 livres; et en 1783, à 400 livres.
Sources: les commanderies du Grand-Prieuré de France — Eugène Mannier — Paris, Aubry et Dumoulin, 1872 (Paris)